Extraits bibliques et petites chroniques ponctuels

Je propose pour ce sujet de taper quelques extraits de livres, interview, articles pour l'information, la découverte et le bonheur de chacun

Citation :

L'homme primitif avait la culture du silex taillé qui le reliait obscurément, mais complètement, à l'ensemble du cosmos. L'ouvrier d'aujourd'hui n'a même pas la culture du roulement à biles que son geste automatique façonne par l'intermédiaire d'une machine. Et pour retrouver l'ensemble du cosmos, pour se situer dans la nature, il doit s'approcher des fenêtres étroites que, dans sa prison sociale, l'idéologie dominante, ici ou là, veut bien entrouvrir pour lui faire prendre le frais. Cet air est lui même empoisonné par les gaz d'échappement de la société industrielle. C'est lui pourtant que l'on appelle la Culture

Henri Laborit, Eloge de la Fuite p53
(éditions Folio essais)

Citation :

Avec une conscience lucide de ce que nous sommes, il est tout de même tragique de penser que l'éducation des enfants est confiée aux adultes, le trouvez vous pas ?

[...]

Avant de vouloir préparer vos enfants au bonheur, tâchez, si vous le pouvez, de ne pas participer à l'édification de leur malheur. C'est la grâce que je vous souhaite, et qui a peu de chances de vous être accordée si votre mort précoce ne leur fournit pas l'occasion de vous transformez en un mythe, qu'ils pourront alors façonner suivant leur désir.

Henri Laborit, Eloge de la Fuite p64
(éditions Folio essais)

Citation :

Affectivement je me moque bien de l'avenir de l'espèce, c'est vrai. Si l'on me dit que c'est pour mes enfants et les enfants de mes enfants que je souhaite un monde différent, et que cela est "bien", je répondrais que ce n'est alors que l'expression de mon narcissisme, du besoin que j'éprouve à me prolonger, de truquer avec la mort avec une descendance qui ne présente pour moi d'intérêt que parce qu'elle est issue de moi. Ne vaut il pas mieux alors rester célibataire, ne pas se reproduire, que de limiter les "autres" à cette petite fraction rapidement très mélangée et indiscernable de nous même ? Sommes nous si intéressants que nous devions infliger notre présence au monde futur à travers celle de notre progéniture ? Depuis que j'ai compris cela, rien ne m'attrisre autant que cet attachement narcissique des hommes aux quelques molécules d'acide désoxyribionucléiques qui sortent un jour de leurs organes génitaux.

Henri Laborit, Eloge de la Fuite p69
(éditions Folio essais)

Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.

Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma Douleur, donne-moi la main ; viens par ici,

Loin d'eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées ;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant ;

Le Soleil moribond s'endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l'Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.

Baudelaire, Les Fleurs du Mal